Nous sommes le 23 septembre, il est presque 00h et les kicks résonnent déjà dans un hangar au loin.
Avec comme maître d’orchestre DE VS. TROIT, DJ Pete, Domenico Crisci, Freddy K et Sinus O en live, le nouveau collectif semble s’inscrire dans la lignée de biens des confrères avec son line-up 100% techno. Pourtant, tout comme son premier événement du 24 mai, la MYST propose des performances artistiques inédites avec cette fois-ci un fashion show tout en cuir, à l’image de la soirée appelée « Cuir en cage ».
Les sets s’enchaînent et à 3H une dizaine de personnes arrivent et se placent à divers endroits de la salle arborant un néon à la main, pour se faire voir. Lumières et regards braqués sur les performeurs qui, eux, semblent fusionner avec la musique arborant leurs tenues de cuir, toutes aussi sensuelles les unes que les autres. Car oui, intrigante et mystérieuse, la MYST mise aussi sur la liberté reprenant la politique « no photo » du célèbre temple berlinois permettant à un public mixte/LGBT de se retrouver sans tabou, ni complexe. Mais alors qui se cache réellement derrière le collectif et quel est leur vision de la fête ?
Melissa, à la tête du collectif avec son acolyte Nicolas, nous explique qu’il lui paraissait incontournable de créer une entité qui leur correspond et qui correspond aussi à leur vision de la scène techno. Guidés par un élan commun, Mélissa souhaite aussi mettre en avant l’idée de se faire plaisir et de transmettre au public leur passion. Mettant en corrélation la musique et l’art, l’idée de MYST est aussi « d’intégrer la culture alternative dans la nuit parisienne ». Brisant d’une certaine façon les codes de la fête, les performances imaginées par Melissa et Nicolas sont loin d’être acquises, notamment pour le défilé où il s’agissait de monter tout un scénario.
«Pour être tout à fait honnête, quand on a pensé au thème cuir en cage et à la performance full cuir, c’était un peu un défi pour nous. Bien qu’on évolue dans ce milieu, on n’avait jamais organisé de défilé et ça a été un vrai challenge. Heureusement, plein d’amis et de marques sont venus nous prêter main forte et je pense qu’on a réussi notre pari. Le but est de varier les plaisirs sur chaque événement et de proposer des performances différentes à chaque fois. C’est aussi une façon pour nous d’expérimenter et d’apprendre à dompter des milieux qui nous sont pour le moment totalement inconnus. »
Pari gagné ? C’est certain en voyant les publications sur le mur de l’événement remplit de « Merci » ou « C’était Génial ». Si le public semble satisfait de cette fête décomplexée, quand est-il des performeurs ? Qui se cache derrière ces danseurs et à quoi ressemble leur vision de la fête ?
Will, 26 ans « Je suis designer et j’ai ma propre marque HEX. Après avoir beaucoup échangé avec Mélissa, nous avons pensé à collaborer entre nos deux projets : MYST et HEX. Depuis que je pense à développer mes produits, on a pensé qu’ils pourraient être mis en avant durant la performance à la MYST 001.»
Comment penses-tu que les gens ont ressenti cette soirée ?
Oui, certains ont pu penser que c’était inhabituel et un peu choquant. Mais la plupart des gens ont accepté – ce qui est, je pense, génial. Il y avait quand même un certain niveau d’intrigue ou de choc, mais c’était attendu.
C’est assez novateur le système de « no photo » via la gommette (comme on peut le voir à Berlin) pour une soirée parisienne, penses-tu que cela peut marcher à Paris ?
C’est une bonne initiative et oui ça peut marcher – mais seulement si il n’y a pas de moyens de communication dans tout le bâtiment. Le fait est qu’il y avait une caméra qui suivait les performeurs, générant une grande lumière dans la foule, et chaque personne pensait qu’elle pouvait, elle aussi, filmer quelque chose. Quand les gens voient quelque chose de cool, ils veulent immédiatement le capturer. Modifier le comportement des gens prendra du temps, mais cela doit commencer de tout en haut – aucun moyen de communication pour personne. Cela peut sembler risqué, mais ça en vaut la peine.
Selon toi, qu’est-ce qui fait la différence des événements MYST ?
Le lieu était incroyable ainsi que les gens travaillant sur ce projet. J’ai aussi adoré la sélection des artistes, mais le lieu et ce sentiment « underground » était la meilleure partie.
Pourrais t-on comparer la Myst au péripate ou à la BP ? Qu’est ce qui les différencient ou rassemblent?
La péripate est bien de par sa location mais la MYST était 10x mieux. Avec la MYST, il y a un concept, un thème et un style. Champs Libre concurrence plutôt bien le concept du collectif puisque leurs événements sont incroyables par la location mais aussi ce sentiment d’être libre – qui est très dur à recréer. J’ai hâte de voir comment sera le deuxième version de celui-ci.
Alain, 24 ans (tout à droite) « Je suis assistant -en stage- d’une artiste à Amsterdam. Là-bas, je développe aussi la pratique de performers et drag – pour le moment pour d’autres artistes, et petit à petit la mienne. Aujourd’hui, je fais partie de la House of Hopelezz, une des plus vieilles houses drag de la ville. Quand je suis à Paris, je sors dans plusieurs lieux de la scène underground: Champs Libre, Péripate, BP, les teufs à la Station mais aussi les squats tel que le Collectif 23, La Capella, la Bougie etc. Evidemment, je participe aussi aux événements de la scène queer émergente : la Kaliente, Kermesse et la Toilette. Je me suis retrouvé à la MYST suite à un ami qui a tagué mon nom, sur le profil de Will, qui cherchait des performeurs. Je ne le connaissais pas à l’époque mais ça a très vite matché.»
Comment penses-tu que les gens ont ressenti cette soirée ?
De mon côté, j’ai beaucoup apprécié car, maintenant, j’ai pas mal l’habitude de performer et je me suis senti « comme chez moi ». Mais j’étais très frustré que ce soit si court, j’aurais aimé qu’on reste plus longtemps dans la foule et qu’on s’y imprègne. Rester plus longtemps aurait rendu notre performance plus visible car certains l’ont raté. La plupart des personnes que j’ai vu ou celles à qui j’ai parlé après le show semblaient avoir vraiment appréciés notre performance.
C’est assez novateur le système de « no photo » via la gommette (comme on peut le voir à Berlin) pour une soirée parisienne, penses-tu que cela peut marcher à Paris ?
Ce n’est pas vraiment novateur, Champ Libre l’a mis en place pendant plus d’un an, et sans doute d’autres endroits mais je ne m’en souviens plus. Il me semble qu’au Heaven à Villejuif ils l’avaient fait une fois ou deux. De mon côté je ne suis pas forcément pour, je pense que les photos et vidéos sont valorisant en terme de documentation. Après , bien entendu, il y a le respect de l’autre à mettre en place, mais je pense qu’il doit être fait consciemment et pas sous la contrainte. Donc je suis plutôt pour exclure/pénaliser ceux qui utilisent mal ce médium (filmer des gens qui ne sont pas conscients/éclairer la foule de manière intrusive cf. dans les darkrooms).
Selon toi, qu’est-ce qui fait la différence des événements MYST ?
C’était ma toute première MYST mais déjà, j’ai beaucoup apprécié que ce soit à Sarcelles. La trajet est un peu rebutant mais finalement ça fait du bien de s’extraire du connu et de découvrir l’inconnu. J’ai trouvé la performance vraiment cool, enfin ce petit show, le côté amateur m’a plu. À refaire, mais avec un show plus long la prochaine fois!
Pourrais t-on comparer la Myst au péripate ou à la BP ? Qu’est ce qui les différencient ou rassemblent?
Je ne dirai pas que Myst est semblable au Péripate ou à la BP. Je pense que ces soirées appartiennent au même courant avec une vision des choses similaires. Quelque part, la Myst émerge des deux autres collectifs qui, eux, sont beaucoup plus anciens. J’y ai ressenti une énergie similaire quelques fois. Après ce qui différencie la MYST des autres, selon moi : la population très jeune et un peu pisto ainsi que le prix assez élevé. Je suis pour l’ouverture à tous et je ne critique pas mais ça amène une autre énergie.\nFinalement, qu’est-ce qui te donnent envie de retourner à ces soirées qui prennent le contre pied au format club où les gens sont constamment accrochés à leur téléphone?\n\nJ’y retournerai pour la qualité du son, et aussi pour l’envie de re-participer à une performance si celles-ci continuent!
Alice, 25 ans «Je suis étudiante en mode à l’IFM , styliste en free lance et je gère la Direction Artistique de la revue en ligne Nouvelle Vogue.»
Comment penses-tu que les gens ont ressenti cette soirée ?
C’était très touchant de voir tout ce monde se réunir autour d’une passion commune : la mode. Tout le monde y mettait du sien, se conseillait, s’aidait,….. J’adore l’idée de réaliser des performances en soirée, cela apporte une nouvelle vision du monde underground. Les nuits parisiennes ne sont pas que tournées vers la drogue. D’autres choses rentrent en compte : l’acceptation de l’autre, l’ouverture d’esprit, le besoin de lâcher prise sans jugement sans genre, tout cela illustre bien l’évolution des codes et des valeurs des nuits parisiennes. Je pense que l’on aurait du faire durer le plaisir un peu plus longtemps ! A REFAIRE !
C’est assez novateur le système de « no photo » via la gommette (comme on peut le voir à Berlin) pour une soirée parisienne, penses-tu que cela peut marcher à Paris ?
Ce n’est pas la première fois que l’on me colle une gommette sur mon tel (champs libre). Je pense que cela peut marcher à Paris si cela reste dans un concept underground. Personnellement quand je vais en soirée je ne pense pas a sortir mon téléphone, ce que je vois et ce que je vis n’appartient qu’à moi. Dans la mentalité de la MYST et autre type de soirée, on part pour un voyage , une expérience. J’aime ce côté exclusif et je pense que cela peut fonctionner car le principe exclusif est déjà dans nos coeurs.
Finalement, qu’est-ce qui te donnent envie de retourner à ces soirées qui prennent le contre pied au format club où les gens sont constamment accrochés à leur téléphone?
LES PERFORMANCES justement ! l’idée d’allier art et techno musique me plait beaucoup et j’espère que MYST va continuer à nous surprendre ! (live performance de peinture ?bandage performance ? expo ? ) Il y a pleins de terrains à nous faire découvrir et j’ai confiance en la MYST pour cela !