Interview – Charlotte M.

Nous avons découvert Charlotte M. lors d’une sortie au Popolare où elle était accompagnée d’un quintette, une prestation de haute volée voguant entre le jazz et le blues. Charlotte M. est une voix, une pianiste talentueuse, dont la justesse et l’élégance nous ont séduits. Nous l’avons rencontrée dans un café du cœur de Paris.


ItinéraireBis : Peux-tu nous parler de tes inspirations et de l’univers que tu souhaites partager ?

Charlotte M. : Mes inspirations sont extrêmement diverses, mais la Soul, le Rock et le Jazz résonnent particulièrement en moi. En définitive, j’aime profondément le blues, tant brut comme chez Howlin’ Wolf ou B.B. King qu’en tant que fondement de ces grands styles. Je crois que tout ce que je recherche dans une musique, notamment chantée – y compris classique – se trouve dans l’essence du blues : une voix riche, pleine de vécu, un rythme parfois entêtant, des paroles fondées sur des expériences humaines simples mais infiniment évocatrices, des instruments au son dense, consistant, brut, organique… et des lignes mélodiques mélismatiques et déchirantes. Pour moi, c’est la simplicité absolue, au sens le plus élogieux du terme, car c’est là où se rencontrent de manière superbement dépouillée l’humain, l’instrument – maîtrisé mais libre – pour créer cette dimension déjà presque divine, la musique. Comme le disait Léonard de Vinci, la simplicité est la sophistication absolue…

D’ailleurs, j’ai appris récemment que l’entourage de Charlie Patton, père du « delta blues », le qualifiait de « one-man band » car il jouait et chantait avec sa bouche, avec ses mains, mais aussi avec ses yeux, sa tête, son dos, tout son corps, tout le temps, en toutes circonstances… C’est ça que je trouve merveilleux. L’homme ou l’instrument transcendé de tout son être dans la musique.


Tu as fait des études dans l’une des plus prestigieuse école de commerce françaises, quand as-tu décidé de te lancer dans la musique ?

C’est un électrochoc que j’ai vécu enfant avec la musique. Toutes mes pensées tournaient autour de mes découvertes musicales, mes journées prenaient sens par mes sessions d’écoute quotidienne après l’école. Or, écouter ne me suffisait pas. Je voulais vivre la musique, la manière la plus immédiate étant de la chanter… Cela relevait et relève toujours de la pulsion vitale. Dans ces conditions, j’ai toujours su que la musique aurait la première place dans ma vie – mais sous quelle forme ? J’ai toujours énormément aimé les études.

En fait, jusqu’à récemment, la musique relevait surtout de ma vie intérieure, de mon intimité. Depuis mon entrée en école en 2012, j’ai voulu dénouer cette tension : j’ai entre autres monté un groupe avec des amis et nous avons joué pendant trois ou quatre ans devant des publics conséquents, majoritairement privés, liés à l’école.

Aujourd’hui, je suis diplômée, j’ai derrière moi plusieurs expériences conséquentes en entreprise, et le plaisir que j’ai pris à mener ces nombreux projets musicaux en parallèle a confirmé mon envie de faire de la musique une priorité. Aujourd’hui, je m’attelle à découvrir, tout en la construisant, mon identité de musicienne. Cela prend du temps, demande beaucoup d’énergie, d’où le temps que je m’octroie aujourd’hui. Mais je ne regrette pas du tout mon choix d’avoir jusque là consacré le plus clair de mon énergie aux études.

https://www.youtube.com/watch?v=XMXiRqmVUls&feature=youtu.be


As-tu suivi des cours de piano par le passé ?

J’ai pris des cours de piano pendant une dizaine d’années, principalement de classique, puis de jazz. Aujourd’hui je m’accompagne principalement.


Te verrais-tu évoluer sur d’autres styles de scènes ? Lesquelles ? Tu travailles sur la production d’un premier EP, peux-tu nous en dire davantage ?

Je travaille effectivement à la composition et l’écriture de plusieurs morceaux que j’envisage sous forme d’EP cette année. L’envie de composer m’est venue naturellement : comment s’exprimer au-delà de la pratique musicale, comment aller plus loin ? Bien que je débute dans cette pratique, le fait de créer m’apparaît aujourd’hui comme incontournable. Pour être honnête, je suis moi-même curieuse de découvrir ce que sera mon style et à quel point certaines influences s’y feront – ou non – ressentir ! Je suis incroyablement impatiente de développer cela.


As-tu des musiciens pour t’accompagner ou souhaites-tu être seule avec ton piano ? Envisages-tu de travailler en collaboration avec d’autres artistes ? Pour poser ta voix sur des productions par exemple ?

Sur scène ou en studio, je ne souhaite pas nécessairement être seule avec mon piano. D’abord, j’aime jouer avec d’autres musiciens, y compris me faire accompagner au piano et me concentrer sur le chant. Ensuite, mes compositions nécessiteront d’être jouées avec plusieurs musiciens, même si je décide de rester au piano. D’ailleurs, comment faire autrement que de collaborer avec d’autres artistes ? Je pense que le meilleur travail de composition se fait en co-construction.

Je pourrais tout à fait poser ma voix sur des productions, oui. Je l’ai d’ailleurs déjà fait pour un groupe de musique électronique, FD Odyssey.


Nous avons en tête un duo que nous avons récemment rencontré, le groupe UTO qui propose quelque chose d’original en trip-hop. Te verrais-tu sur un projet similaire ?

Je pourrais participer à un projet similaire de manière ponctuelle. Mais j’avoue que je tiens (pour le moment ?) à privilégier un son plus « organique » qu’électronique.


Peux-tu nous citer quelques chanteuses qui pourraient être assimilées à des exemples ? 

Au-delà de la liste interminable de chanteuses et chanteurs de toutes époques que j’aime et qui m’inspirent, je citerais aujourd’hui simplement Amy Winehouse et la chanteuse américaine LP. Tout en elles (de ce que je connais !) me parle et m’inspire : le timbre de leur voix, leur technique infaillible, laissant largement place à une force d’interprétation exceptionnelle, leur style musical (pourtant bien différent), leur personnalité globale : on sent chez elles une très grande humilité et une sincère correspondance entre leur personnage privé et public, qui se traduit par une certaine discrétion et une présence médiatique assez retenue et maîtrisée.


Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour l’année à venir ?

De très belles rencontres !


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