Avant de fêter la sortie de la compilation In The Red Vol. 2 qui rend hommage au Jazz-Funk anglais le 8 mars au New Morning, le DJ et producteur (mais pas que, rendez-vous plus bas pour en savoir plus) Saint-James nous en dit un peu plus sur son parcours et ses projets.
ItinéraireBis : Bonjour Saint-James. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs.
Je m’appelle Maxence Robinet, j’ai 26 ans, je suis DJ et producteur, label manager de Discomatin et Chuwanaga, cofondateur du Easter Sounds Festival, membre du média et promoteur Phonographe Corp et j’anime une émission mensuelle sur Le Mellotron qui s’appelle Syncope.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours dans la musique ? Quelles sont vos influences ?
J’ai eu la chance d’être très tôt en contact avec la scène parisienne et ses artistes talentueux. J’ai commencé à mixer et faire du son dans ma chambre assez tôt et ça s’est imposé naturellement comme une route à suivre. Mes plus grandes rencontres et influences sont venus de mon frère et ses amis de La Mamie’s dès leurs débuts, puis le crew Phonographe Corp, ensuite Jim Irie avec qui entre autres on a fondé Discomatin qui m’a fait découvrir plein de styles, entre french boogie et broken beat… Côté DJ, je puise mes influences du côté anglais bien sûr avec toute la culture selector, mais j’aime aussi bien faire des sets de musique électronique. Je ne rechigne pas sur un set de jungle ou de house !
Côté productions, je ne sais pas si c’est vraiment une influence, mais depuis que j’ai rencontré Greita de Disques Flegon qui bosse au Studio Delta, ça m’a beaucoup aidé à progresser, donc oui c’est une source d’inspiration. Big up à lui et son crew !
Vous êtes l’un des fondateurs du label Chuwanaga. Quel a été le déclic pour créer votre label ? Quelle est la patte artistique du label ?
Au départ j’ai voulu créer le label pour sortir les productions de Koji Ono, l’artiste ayant signé la deuxième sortie du label. On s’est rencontré via son frère Seiji Ono aka Elliot Bernard, un très bon ami depuis longtemps. Elliot et moi avions ce projet, mais il a dû se concentrer sur Melodies International, le label de Floating Points qu’il gère maintenant à plein temps à Londres. J’ai de mon côté avancé sur le projet de son frère. Entretemps, Clémentine m’a rejoint très vite pour m’aider à fonder Chuwanaga. Au final, on a d’abord sorti mon projet de compilation, In The Red Volume 1 que j’avais commencé entre temps puis donc du coup Incognito EP, le 4 titres de Koji Ono.
Avec Clémentine, on cherche à combiner des projets actuels et des rééditions, quelque chose qui reflète bien sûr notre sélection et nos goûts que l’on retrouve en DJ sets : on y trouve du soul-jazz moelleux, du Brit Funk déjanté, du funk aux allures de New Wave, de la house déguisée en boogie (ou est-ce l’inverse ?). On aime le son authentique de la fin des années 70 et du début des années 1980, le mariage du Fender Rhodes ou des synthé avec une vraie batterie, les solos qui te transportent dans une autre dimension, les morceaux deep qui ont une vraie profondeur dans leur composition. Bref, on essaie de traduire tout ça dans notre choix de sorties et dans l’attention que l’on porte au packaging, aux liner notes…
Vous sortez la compilation In The Red Vol. 2 qui rend hommage au son Jazz-Funk Anglais de la fin des années 70 au milieu des années 80. Comment pouvez-vous définir cette période en quelques mots.
Le mouvement jazz-funk à la fin des années 1970 est avec la Northern Soul et l’Acid House, l’un des plus grands dans l’histoire du clubbing anglais. À Londres et dans les alentours, toute cette effervescence autour de la musique jazz-funk, funk et disco en provenance des USA s’est traduite dans les clubs et avec des groupes qui se sont alors formés. C’est un peu là où la magie opère : ces groupes ne vont pas copier le son américain, mais bien inventer leur propre son, plein d’audace, sûrement aussi très naïf, mais en tout cas définitivement le produit de l’histoire anglaise. C’est un son souvent très rapide, assez chargé en basses, nourri des expérimentations dub dont le reggae londonien se nourrit alors. C’est donc dans ce plein mouvement jazz-funk que naît le Brit Funk.
Parmi ces groupes, on retrouve énormément de descendants afro-caribéens, une jeunesse en train d’inventer sa propre définition de la black britishness, en pleine crise économique et avec l’arrivée au pouvoir de Thatcher.
Jusqu’alors, l’Angleterre est encore très raciste. Avec ce mouvement culturel et social, avec ses propres codes vestimentaires, ses danseurs, … Tout cela va évoluer vers plus de tolérance. Évidemment ça paraît très automatique quand on connaît le Londres cosmopolite d’aujourd’hui et que je le résume en deux phrases, mais c’est un vrai changement de mentalité qui opère alors. C’est la première ébauche du club comme espace multiculturel où se côtoient riches et pauvres, gays et hétéro, noirs et blancs. La musique a donné une visibilité à cette communauté alors exclue du jeu des médias et de l’espace public de manière générale.
Quoi qu’il en soit ça a été un terreau fertile pour plein de choses ensuite, ça c’est sûr !
Vous allez fêter la sortie de cette compilation le 8 mars prochain au New Morning. Un petit mot sur cette soirée. Quels rapports entretenez-vous avec Echoes Of, Perry Louis, Clémentine et Deejay Double K ? Si vous deviez choisir 1 track pour chacun de ces artistes.
Echoes Of, c’est le groupe de reprises résident au New Morning avec lequel on a déjà travaillé l’année dernière au Easter Sounds sur une sélection de morceaux jazz-funk. C’était une super expérience et je sais qu’ils ont hâte de jouer les morceaux de la compilation en live !
Perry Louis, c’est un peu notre parrain au Easter Sounds Festival mais aussi un DJ anglais qui m’a beaucoup aidé à rencontrer certaines figures de la scène Brit Funk dont il faisait partie comme danseur.
Clémentine, c’est celle avec qui je partage presque tout – pas les disques encore heureusement.
Deejay Double K, on s’est rencontrés à Lyon, c’est un fou de Brit Funk, il écrit un livre sur le sujet, il a un groupe de Funk incroyable qui s’appelle The Funky Drive Band et un magasin de disques avec sa femme, qui s’appelle The Sounds Of Music dans le vieux Lyon. Et tout ça sur son temps libre !
Quels sont vos coups de cœur musicaux en ce moment ?
En ce moment, je suis à fond le groupe Ishkero, un groupe parisien de jazz-rock/fusion avec flûte traversière, batterie, claviers, percussions, guitare et basse. Ils sont trop forts et si Dieu le veut ils iront très loin je pense. En tout cas la période leur est propice et ils sont excellents !
Quels sont vos projet à venir ?
On prépare un beau 45 tours comme prochaine sortie sur Chuwanaga, on en dira bientôt plus, mais c’est anglais et du coup, c’est du Brit Funk 😉 Il y a aussi une collaboration de Koji Ono avec Atmosfear dans les tuyaux, l’un des groupes les plus emblématiques de cette période Brit Funk.
Le mot de la fin…
Merci pour ces questions, et à vendredi (ce soir) pour venir célébrer le jazz-funk anglais !